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Article publié le 04/05/2021
Mis à jour le 06/05/2021

3 dates, 3 anniversaires à commémorer

Il est environ 22 heures ce 18 juin 1940 quand le canal 265 des ondes courtes de la BBC diffuse cet appel : "Le dernier mot est-il dit ? L'espérance doit-elle disparaître ? La défaite est-elle définitive ? Non !". Brouillée par les parasites, la voix semble lointaine, presque irréelle, fragile, mais elle est déterminée : c’est la voix de la France Libre, celle de Charles de Gaulle, qui appelle à la résistance au moment où, la veille au soir, Philippe Pétain annonçait à la radio française son intention de capituler et de signer un armistice avec l’Allemagne nazie.

"Moi, général de Gaulle, actuellement à Londres, j'invite les officiers et les soldats français, qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s'y trouver, avec leurs armes ou sans leurs armes, j'invite les ingénieurs et les ouvriers spécialistes des industries d'armement qui se trouvent en territoire britannique ou qui viendraient à s'y trouver, à se mettre en rapport avec moi. Quoi qu'il arrive, la flamme de la résistance française ne doit pas s'éteindre et ne s'éteindra pas". Chaque mot de cet appel enregistré dans l’après-midi dans un studio de la BBC est pesé et soigneusement pensé. Arrivé à Londres la veille de sa diffusion, de Gaulle sait en effet que Pétain va capituler et il a déjà en tête l’idée de poursuivre les combats. Pour cela il doit négocier l’accord des Britanniques, alliés de la France.

La radio comme une arme politique

Dans l’après-midi du 17 juin, il rencontre Churchill pour lui exposer son plan. Ce dernier lui apporte alors son soutien et met à sa disposition, non sans contrôle, les moyens radiophoniques de la BBC. Privé d’armée et de matériel, de Gaulle fera de la radio une arme politique. Emettant dans toute l’Europe grâce à ses émetteurs en grandes ondes et en ondes courtes, la BBC est puissante et influente. Elle est cependant peu écoutée en France. C’est la presse, encore relativement libre, qui reprenant dès le 19 juin 1940 le texte intégral de l’appel, parfois en une, en assurera la diffusion populaire dans l’Hexagone.

Au-delà du faible nombre de volontaires ayant entendu ou lu l’appel et rejoint de Gaulle à Londres pour combattre, l’appel du 18 juin marque surtout l’acte de naissance historique et politique de la France Libre. Il est également un marqueur fondamental du Gaullisme et de « cette certaine idée de la France » à laquelle notre Région rend un hommage tout particulier en cette "Année de Gaulle".

"Le général de Gaulle est mort. La France est veuve". C’est le Président Georges Pompidou en personne qui, ce 10 novembre 1970, le visage et la voix marqués par l’émotion, annonce la nouvelle aux Français sur l’ensemble des chaînes de radio et de télévision. A l’âge de 80 ans, l’homme de la France libre né à Lille le 22 novembre 1880 s’était éteint la veille à la Boisserie, sa maison de Colombey-les-deux églises, en Lorraine.

Parti paisiblement alors qu’il effectuait une réussite, jeu de carte solitaire qu’il affectionnait particulièrement, le général emportait avec lui plus d'un demi siècle d'histoire et cette "certaine idée de la France", celle qui, depuis ses premiers combats militaires en Hauts-de France puis politiques au service passionné de la résistance et de la Nation aura toujours dicté ses choix et sa conduite.

En Hauts-de-France, une émotion particulière

Aujourd’hui, cinquante années jour pour jour après sa disparition, les hommages et les commémorations se multiplient dans tous le pays. En Hauts de France, terre natale mais aussi région de cœur du général, ils se teintent bien sûr d’une émotion particulière, dépassant le cadre officiel pour toucher nombre des habitants au cœur même du souvenir qu’ils ont gardé de " leur" Général.

Avec l’âge, c’est toujours l’enfance qui prédomine. Et si je pouvais être moi-même, ce serait probablement rue Princesse, où je suis né ". Extraits de ses mémoires, ces mots de Charles de Gaulle ne sont pas empreints de nostalgie comme on pourrait le penser. Ils nous rappellent qu’au-delà du destin exceptionnel du grand chef d’Etat qu’il fût, l’homme de Gaulle était fondamentalement un fils du Nord, un petit Lillois né le 22 novembre 1890, rue Princesse, au numéro 9, dans la maison de ses grands-parents. Cette solide demeure bourgeoise du XIXe siècle, avec ses boiseries chaleureuses, son mobilier sobre et son jardin d’hiver, c’est la maison de famille des de Gaulle, plus exactement des Maillot, nom de jeune fille de la mère de Charles qui, bien que vivant à Paris, a choisi de perpétuer une solide tradition familiale nordiste en venant à Lille donner naissance à son fils.

Une éducation stricte, mais pas rigoriste

Toute sa vie, Charles de Gaulle restera ainsi très attaché à cette maison, à ce quartier même qui, à deux pas des faubourgs populaires, le conduit, lorsqu’il y revient en vacances avec ses cousins, à côtoyer les enfants de tous les milieux et, il faut bien le dire, à s’échapper parfois des codes de l’éducation stricte qu’il reçoit de ses parents. Pourtant, si la tradition catholique est de mise chez les de Gaulle, elle n’est pas rigoriste. Les valeurs transmises au jeune Charles reposent sur le respect et l’ouverture aux autres, le travail dans l’étude, l’honnêteté, la loyauté et, déjà, la conscience des responsabilités et de l’engagement.

Rue Princesse, le tout jeune de Gaulle est un enfant comme les autres, jouant aux soldats de plombs avec ses cousins ou dans la rue avec ses copains lillois, s’offrant parfois une gaufre chez le pâtissier Meert avec une pièce économisée sur le modeste argent de poche donné par sa grand-mère. Pour beaucoup d’historiens du gaullisme, c’est ici, dès l’enfance, que Charles de Gaulle aurait aiguisé sa "fibre sociale".