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Article publié le 10/11/2022
Mis à jour le 11/11/2022

11 novembre 1918 : dans les coulisses de l’Armistice

C’est un habitant du Pas-de-Calais qui, dès le 5 novembre 1918, sera le premier témoin de la volonté de reddition de l’armée allemande. Six jours plus tard, alors que les Allemands auront tenté de négocier jusqu’à la dernière seconde, l’Armistice était signé à Compiègne.

Il s’appelle Maurice Hacot et vit à Auchel, dans le Pas-de-Calais. C’est lui, ce 5 novembre 1918 à 6 heures du matin qui sera le premier informé de la demande d’Armistice de l’Allemagne. Maurice Hacot est alors Caporal-chef de l’armée française affecté au centre télégraphique parisien de la tour Eiffel. Il ne se doute alors pas que le court message en Morse qu’il vient de recevoir de l’État-major allemand demandant l’arrêt des combats fera de lui le premier témoin français de ce moment historique. Le 5 novembre, six jours avant la signature officielle de l’armistice dans la clairière de Rethondes, dans la forêt de Compiègne, en Hauts-de-France, lui, il savait.  Acculée sur tous les fronts, l’Allemagne veut en effet rendre les armes après quatre ans d’une guerre particulièrement sanglante qui a tué près de 10 millions de soldats, autant de civils, et faisant plus de 21 millions de blessés et de mutilés.

Le choix complexe d’un lieu tenu secret jusqu’à la dernière minute

C’est presque par hasard que le choix de Compiègne a été retenu pour la signature de l’Armistice. L'état-major voulait en effet un endroit à la fois discret tout en permettant de recevoir deux trains distincts : celui de la délégation alliée comprenant le wagon salon du Maréchal Foch, et celui mis à la disposition des Allemands. Complexe. Jour et nuit, toutes les cartes ferroviaires du pays sont passées au crible. On ne trouve pas… Jusqu’à ce qu’un officier redécouvre, bien caché, un épi de tri oublié et désaffecté au Francport, lieu-dit rattaché à la commune de Choisy-au-Bac, dans l’Oise, tout près de Compiègne. Ce sera donc là. Mais il faut s’organiser.

Trois jours avant l’Armistice, le 8 novembre, à 5h30 du matin, les deux trains sont acheminés sur place. De leur côté, les Allemands sont pris en charge à la frontière belge par des militaires français, chargés de les conduire vers le lieu de signature de l’armistice, qu’ils ne connaissent pas. Six voitures composent le convoi. Après un bref arrêt pour se restaurer à Homblières, dans l’Aisne, ils se rendent à la gare de Tergnier, dans l’Aisne toujours, où un train les attend pour les conduire jusqu’au lieu secret de la forêt de Compiègne.

Guerre des nerfs et inflexibilité

Assombri par les arbres qui ne laissent filtrer que très peu de lumière, l’endroit est austère et participe à la mise en condition des Allemands. C’est une minuscule futaie traversée par les deux voies ferrées parallèles où sont parqués les trains côte à côte. Entre les deux, un chemin de fortune en caillebotis a été aménagé pour permettre les allers et venues des négociateurs.

D’emblée, comme il le confirmera dans ses mémoires, le représentant du gouvernement allemand, Matthias Erzberger, décrit "un véritable calvaire".  Lui qui pensait pouvoir encore négocier, en tout cas alléger les conditions de sa reddition, voit fondre tous ses espoirs quand il découvre le lieu.  Reçu à 10 heures par le maréchal Foch qui l’attend, debout, dans son confortable wagon salon, il comprend rapidement qu’il n’obtiendra rien, ou presque. S'ensuit alors ce dialogue entré dans l'histoire :

  • "Qu'est-ce qui amène ces Messieurs ? ", demande Foch tout de go.
  • "Quelles sont vos propositions", rétorque Erzberger.
  • "Je ne suis autorisé à vous les faire connaître que si vous demandez un armistice. Demandez-vous un armistice ? ", répond alors le Français.
  • " Oui, nous le demandons ", se soumet alors l’Allemand, conscient qu’il n’obtiendra rien.

Sans quasiment aucune concession, le premier texte préparatoire de l’Armistice est très dur pour les Allemands, "humiliant" diront-ils plus tard. Le lendemain, le 11 novembre, à 2 h 15 du matin, Erzberger et sa délégation allemande se rendent une ultime fois dans le wagon français.  Trois heures durant, ils tentent pied à pied de négocier des assouplissements, de nuancer quelques mots.  Mais Foch est inflexible.

En cette matinée glaciale, à 5 h 20 du matin, l'Armistice est officiellement signé dans la petite clairière de la Forêt de Compiègne.  Les combats sur l’ensemble des fronts devront cesser à 11 heures du matin. Ce dernier jour de guerre, 40 000 soldats sont morts au combat.